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Affaire Hakimi: Me Frank Discepoli réduit en pièces l’enquête

Affaire Hakimi: Me Frank Discepoli réduit en pièces l’enquête

| Publié le 16/09/2020 à 15:13

Me Frank Discepoli, l’avocat de Farid Hakimi, est le premier avocat de la défense à demander l’irrecevabilité des poursuites. Ce mercredi, il plaide en faveur du boxeur professionnel considéré comme le meneur de la bande de braqueurs. L’avocat réclame toute une série d’acquittements, par manque de preuves.

Frank Discepoli évoque un premier fait, que conteste totalement Farid Hakimi. Rappelons que le procureur fédéral a évoqué le cas d’une famille de Boussu, qui tient une friterie et où une importante somme d’argent, soit 368.000 euros, a été volée. Marwane Hammouda, un autre inculpé, a déclaré qu’Hakimi aurait donné des informations pour commettre les faits. Me Discepoli rappelle que son client n’a jamais été auditionné. D’ailleurs, Marwane Hammouda est revenu sur ses déclarations, précise l’avocat de Farid Hakimi.

Me Discepoli regrette les nombreuses fois où son client n’a pas été auditionné. Au moment des faits, Farid Hakimi était un sportif accompli. Il gagnait bien sa vie. Pour son avocat, la déclaration de Marwane Hammouda, sur laquelle il est revenu par la suite, n’est donc pas suffisante pour mettre en joue son client.

Un home invasion, du côté de Bernissart, est évoqué par la suite. Hakimi a demandé une confrontation avec les autres prévenus impliqués dans les faits, mais elle n’a jamais eu lieu. En l’absence de téléphonie, et de preuves, Me Discepoli demande l’annulation des poursuites. L’avocat reprend dans la même continuité avec le vol d’une voiture. Pour Me Discepoli, il manque d’éléments à charge de Farid Hakimi. Encore une fois, l’avocat évoque les procès-verbaux des enquêteurs. Il fait bien entendu référence au chef d’enquête, Ludovic N., écarté de la police judiciaire fédérale de Mons. On reproche à l’inspecteur d’avoir violé son secret professionnel et d’être tombé amoureux de la compagne de Marwane Hammouda, un autre inculpé.

Me Discepoli fait ensuite référence à un vol avec violence dans l’entité de Dour, où 2.000 euros ont été dérobés. C’est la compagne de Marwane Hammouda qui désigne Farid Hakimi comme responsable lui aussi. Elle aurait surpris une conversation entre les deux hommes, entre Hakimi et son compagnon. Me Discepoli tient à bien préciser qu’Hakimi et Hammouda sont en désaccord.

L’avocat évoque les faits, un à un. Il demande son acquittement. Pour de nombreux dossiers, Me Discepoli répète que son client n’a jamais été entendu. Il n’y a même pas eu d’analyse de téléphonie, précise l’avocat. Ce dernier va jusqu’à dire que des éléments du dossier ont été éludés, « volontairement », par les enquêteurs. Il étaye sa plaidoirie avec le témoignage d’une victime, qui après avoir lu des articles de presse, pense que Monsieur Hakimi pourrait être l’un de ses agresseurs.

Acquittement sur acquittement !

Me Discepoli en vient à l’agression de Laurent Cascione, de sa mère et de sa grand-mère. Pour l’avocat, c’est un vol avec violence assez différent de ce qui est reproché à Farid Hakimi. Des armes ont été utilisées, mais aucune analyse balistique n’a été réalisée. C’est le plus grand regret de Me Discepoli, mais pas le seul. Il rappelle qu’une victime, Laurent Cascione, a reconnu un inculpé. « Monsieur Rogac n’a jamais été entendu », explique Me Discepoli. « Ce qui me pose problème, c’est que je n’ai aucune téléphonie, ni sa déclaration. » L’avocat revient aussi sur le fait que les victimes elles-mêmes parlent de trois auteurs, et non de quatre auteurs. Pour lui, il y a donc un auteur de trop ! Il précise aussi que le téléphone portable n’a jamais borné près de Lobbes. Dans le procès-verbal, il est « indiqué qu’il est possible que Farid Hakimi ait éteint son téléphone. » Donc, « il n’y a aucune certitude », rapporte Me Discepoli. Le prévenu lui-même, insiste l’avocat, demande qu’on vérifie son téléphone à l’heure des faits.

Me Discepoli rappelle que Laurent Cascione pensait au départ que son ex-compagne était derrière son agression, et que son compagnon et ses acolytes étaient en fait les auteurs des faits. Les enquêteurs – qui ne comptaient pas parmi eux Ludovic N. parmi eux – procèdent à l’analyse des caméras de surveillance et incriminent une voiture. Le nom du propriétaire est cité, mais il ne sera jamais auditionné. Et pour cause : le 14 mars 2017, une nouvelle information est jointe au dossier. Elle concerne l’agression de la famille Cascione, et stipule que Pascal Faedda, Mohamed Benaouane et Farid Hakimi ont commis les faits. Encore une fois, Me Discepoli demande l’annulation des poursuites car il n’y a pas assez d’éléments accablants.

Et Lasne ?

Me Discepoli expose les faits. Il n’y a que trois malfrats d’après les victimes. Mais beaucoup plus dans le dossier judiciaire, Stéphane Pauwels y compris ! Un document, où l’adresse des faits se trouvait, a bien été retrouvé à son domicile. « Les déclarations de mon client ne sont pas contredites par les éléments du dossier », souligne l’avocat de Farid Hakimi. Rappelons que ce document a été remis à son client, par le Montois Jamal Ennif, l’entremetteur entre Stéphane Pauwels, lui aussi inculpé dans ce dossier, et la bande de braqueurs.

Pour ce qui est du repérage, Me Discepoli remet une nouvelle pièce au tribunal. C’est une capture d’écran provenant de Snapchat Memories (où on peut retrouver toutes les photos instantanées qu’on a prises). On y voit Farid Hakimi avec un ami à Overijse, le 5 mars 2017, près des lieux. Cela provoque l’intervention du procureur fédéral, Julien Moinil, qui demande d’où provient cette image… Vous l’aurez compris, Farid Hakimi nie avoir repéré les lieux avec Benaouane. Me Discepoli réclame donc l’acquittement.

Encore Hammouda !

Le patron de la pizzeria della Nonna, Toni Castronovo, est évoqué aussi par l’avocat de Farid Hakimi. Ce dernier rappelle que lors de sa première audition, le regretté Toni Castronovo qui est décédé en mars dernier, n’a pas reconnu son client. C’est en avril 2017 que la famille, père, mère et fille, a été victime d’un home-jacking. Le couple a été attaché et frappé pendant qu’on leur volait argent, bijoux et voiture. Leur fille a été réveillée par le bruit et a donné l’alerte à sa grand-mère pour appeler la police. Pour Me Discepoli, Toni Castronovo a identifié bien plus tard Farid Hakimi, avec sa « posture de boxeur. » Marwane Hammouda a une nouvelle fois chargé Hakimi, et a déclaré qu’il lui avait proposé de faire un coup chez Toni Castronovo.

« Son frère, mais pas lui ! »

Farid Hakimi est suspecté d’être impliqué dans l’agression violente, où la victime s’est retrouvée avec une arme dans la bouche. Le jeune homme, qui garde toujours des séquelles de son agression, n’a pas pu refermer sa porte. D’après le procureur fédéral, ils se sont mis à trois dessus. C’est d’ailleurs dans cette affaire, que Said Hakimi est en aveux. Par contre, le téléphone de son frère aîné a borné loin, de là où se sont passés les faits.

La mère d’Hakimi !

Me Discepoli plaide aussi en faveur de Malika Drouiche, la mère de Farid Hakimi. Rappelons qu’à la demande de son fils, elle avait recherché une arme dans le bois de Colfontaine. « Il n’y a aucune preuve qu’elle se soit retrouvée avec une arme dans les mains. » Lundi, la mère de Farid a été entendue comme prévenue mais le procureur fédéral a demandé un acquittement pour détention d’une arme.

Farid risque plus de 20 ans de prison, auxquels s’ajoutent 28 mois pour une agression violente dans une boîte de nuit. Pour rappel, la victime, rouée de coups, souffre de graves problèmes dentaires. « Après visionnage des images des caméras de surveillance, et les explications de Monsieur Hakimi, cela semblait cohérent pour les enquêteurs. Alors, que s’est-il passé ? On n’en sait rien », souligne Me Discepoli. Ce dernier rappelle d’ailleurs que la victime a changé à plusieurs reprises sa version des faits. Il demande donc l’acquittement de son client.

Un avenir prometteur

Me Discepoli arrive à la fin de sa plaidoirie. Il a parlé plus de deux heures. Il demande au tribunal de ne pas retenir la qualification de meneur. Un seul inculpé, Lufu Kabongo, l’a désigné de cette manière. « D’après le procureur fédéral, il n’y a aucune circonstance atténuante. Mais je vous demande d’en retenir… », conclut Me Discepoli. Alors qu’il était encore incarcé, Hakimi est transféré à la prison de Bruges. On le surprend en train de menacer l’inspecteur Ludovic N. sur des écoutes téléphoniques, de manière très virulente. « Il ne verra pas sa famille pendant huit mois », continue Me Discepoli. « C’était un boxeur talentueux. Il souhaite retrouver cela. Monsieur est détenu depuis trois ans (trois ans de détention préventive). » Farid Hakimi est, rappelons-le, sous bracelet électronique.